Sylvain Court, tout récent double médaillé d'or aux championnats du monde de trail à Annecy, a fait un crochet par notre petit stade des Bullieux, et a bien voulu se prêter au jeu des questions-réponses que nous lui avons concocté. 

Merci à lui, pour ce geste, sa disponibilité, et le bel exemple de champion qu'il porte et qui transpire dans ses propos.

Oui c'est un petit peu plus long que ce que j'ai l'habitude de faire. Le plus long que j'ai fait jusqu'à aujourd'hui, c'était sur l'écotrail de Paris, 80 km, mais sur un dénivelé différent, plus roulant, 5 heures et quelques de course. Et en temps, ce furent les Templiers avec 6h30 de course. Là on est sur plus de 8 heures de course, à la limite de l'ultra trail, donc c'est vrai que c'était une première pour moi.

Je vais dire, au-delà de 80km… Après ça dépend du dénivelé, du temps de course, mais au-delà de 80km, de 8 heures de course, on commence à être sur une course avec une grosse gestion, et c'est donc un peu la définition de l'ultra.

Evidemment oui, il faut adapter sa préparation à ce qu'on va rencontrer le jour J. Donc, étant sur Bordeaux avec un peu de mal à trouver du dénivelé, il a déjà fallu que mentalement, j'accepte le fait de sacrifier un peu la vie de famille, et de partir tous les week-ends à la montagne, au pays basque dans le massif de la Rhune, ou plus souvent sur Clermont-Ferrand, le Puy de Dôme, ou le massif du Sancy, où habite ma petite femme Adelaïde.

(Rires !). Je ne l'écoute jamais ! Mais bon, il me fait assez confiance. On sent qu'il veut que je réussisse, que je sois plutôt prudent sur le départ de ma course, que j'en garde un peu sous le pied. La consigne était donc de faire une course en gérant plus ou moins à ma main jusqu'à Doussard à la mi-parcours. Et là, on faisait un premier point pour voir si j'avais suffisamment de ressources pour accélérer un petit peu plus et me jauger par rapport aux adversaires… Ce que je n'ai pas du tout fait ! Tout comme à mes habitudes. Je ne suis pas trop un attentiste dans mes courses, j'aime bien être de suite au contact, devant, un peu à la bagarre.

Honnêtement, oui. Je m'étais énormément préparé, énormément investi et j'avais une très très grosse détermination. Mais il était hors de question pour moi de dire aux médias que j'avais la prétention de tenter d'aller chercher le titre. J'avais trop de respect pour les adversaires, et pour moi, tout le monde était vraiment très fort sur la ligne de départ. Mais je sentais que j'étais vraiment bien, que j'avais une bonne sérénité. Je ne me sentais pas trop stressé, et à l'entrainement je passais des séances vraiment bien, avec des bons chronos. Philippe (Progage !) m'avait rassuré quelques jours avant : "Tu as fait des séances costaud. Tu devrais être pas mal", mais sans jamais me dire que je pourrais aller chercher un titre ou un podium. Mais au départ, dans ma tête, honnêtement oui, j'avais l'ambition de suivre un maximum et je rêvais d'un mano à mano avec Luis Alberto, mais  je ne pensais vraiment pas que ça ait lieu ! C'était une grande surprise !

Oui c'est quand même un cran au-dessus, même si aux France il y avait une double ambition. Je n'étais pas encore sélectionné en équipe de France, et il fallait que je mérite ma place. Et Philippe m'avait dit d'assurer le coup, qu'il aimerait bien que je sois en équipe de France, donc d'essayer de faire dans les deux, ou le podium. D'assurer le coup. Mais je lui dis : "Tu sais moi, si je viens sur une course, c'est pour essayer de donner le maximum, et sans paraître prétentieux, je veux être compétitif et tenter d'aller chercher la première place". Et bon, ça a pu se faire, même si je ne dis pas que sur d'autres courses, peut-être que ce sera inversé ! Je serai peut-être dans des mauvais jours et ça ne passera pas. Après, les championnats du monde, c'est le cran au-dessus. Mais c'est vrai que plus l'enjeu est de taille et plus ça me booste. Il y a des coureurs qui pourraient être déstabilisés par les enjeux, le plateau, mais moi, au contraire, ça me donne une motivation énorme. J'ai encore plus envie d'y aller et de me confronter. 

Je n'ai pas l'habitude de me mettre la pression, mais c'est vrai que ce reportage, qui en plus est sorti une semaine avant l'échéance, mine de rien, m'a fait cogité. J'y ai réfléchi, surtout qu'à la fin, je dis "rendez-vous le 30 mai… J'aimerais bien faire un top 5"… Oui, quelque part, on y pense, on se dit que ça aurait peut-être été mieux une semaine après la course ! Et puis en plus, après il y a eu les medias un peu spécialisés, qui émettent des pronostics, et même si je n'étais pas forcément dans les meilleurs pronostics, on voit son nom cité… Et donc là, à quelques jours de la course, j'ai essayé de me couper un peu de tout ça, d'être dans ma bulle. Donc je ne regardais plus trop les réseaux sociaux… !

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